samedi 20 octobre 2007


Echantillon de mon train-train quotidien…


Visualisez un instant l’ambiance du métro parisien en heure de pointe. Pas trop longtemps tout de même, je suis responsable de la santé mentale de mes lecteurs. Eh bien le Mali, c’est tout autre chose. Ici, tout le monde se parle, tout le monde se connaît, un peu comme dans une grande communauté soixante-huitarde, plus cool que baba.

La base des rapports humains : les salutations. On prend des nouvelles de la famille, demande si la nuit a été bonne. Pressé ou pas, on prend le temps de s’arrêter pour boire le thé ou pour une simple « causerie ».

Chaque jour, j’enfourche mon vélo en direction des villages. Au bord des routes, sur le seuil des maisons ou au milieu des champs de maïs, les salutations résonnent. Je prends évidemment bien soin de répondre, fière de mes notions de Bambara fraîchement acquises, preuve de mon désir d’intégration dans ce pays si accueillant.

Mais il faut aussi avouer que je suis inévitablement l’attraction du coin, une minorité visible dira-on. Impossible de passer inaperçu.

Je suis tout de même chaque jour plus étonnée de la capacité de perception des enfants, qui m’interpellent à plusieurs dizaines de mètres. Bon, pas besoin d’un œil de pilote de chasse pour détecter la tâche blanche qui se pointe au bout de la route, c’est vrai. Du coup, j’ai parfois l’impression d’être une star internationale en tournée, à peu de choses près que celle-ci ne serait pas accueillie par un « Bonsoir » tonitruant à 8h du matin, radical pour égayer les débuts de journée difficiles. Autre version, l’économique « Bonjoir », compromis particulièrement bien pensé (si l’académie française me lit) ou encore le mythique « Toubabou ! Toubabou ! Toubabou ! » (blanc) qui me fera toujours autant rire.

Grand mal me prendrait de ne pas honorer ces acclamations d’une réponse énergique et enjouée, lâchant même le guidon de mon vélo pour saluer tout ce petit monde, tel Benoît XVI dans sa Papamobile, au risque de m’affaler joyeusement sur le premier nid de poule venu. J’aime vivre dangereusement…

Ah oui, car mon vélo, c’est comme le Blond, c’est un concept à lui tout seul. Il me rend bien service mais ne me facilite pas toujours la tâche, les freins par exemple ingénieusement fixés à quinze centimètres du guidon…

Je me remémore encore avec nostalgie notre première sortie, moi, tout juste débarquée, l’association m’ayant prié de bien vouloir aller repeindre une pancarte dans le village, où je n’avais encore jamais mis les pieds.

Me voilà donc partie sous le soleil de midi, mon sac plastique pendouillant du guidon. Luttant pour conserver ce faux sourire niais sur mon visage, qui était censé vouloir dire « tout va bien, je gère la situation », j’ai d’abord commencé par ne pas trouver la pancarte en question, que l’on m’avait pourtant consciencieusement indiquée. J’ai donc procédé à une série d’allers-retours remarqués, sous le nez des habitants qui me voyaient pour la première fois. Entre temps, le petit bocal d’essence préparé par Moussa a jugé utile d’exploser dans le sac, répandant son contenu sur mon pantalon déjà plus ou moins propre.

Etant finalement parvenue au lieu dit, je me suis attelée à ma tâche après voir constaté le manque d’herméticité du pot de peinture jaune et l’ampleur des dégâts causés. J’oublie évidement de préciser qu’entre temps, une trentaine d’enfants s’était attroupée autour de moi, agrippant mon vélo et me parlant dans une langue que je ne comprenais pas. Un premier contact éprouvant.

Bref, j’ai donc repeint cette fichue pancarte, les mains tremblantes et intégralement recouvertes de peinture, le sourire niais toujours ancré sur mon visage, même si, à ce stade de l’aventure, le sang-froid commençait à me faire défaut.

Lorsque avec soulagement j’ai enfin pu prendre le chemin du retour et semer la ribambelle d’enfants qui tentaient de s’accrocher à mon porte-bagages, je n’ai alors pas trouvé de meilleure idée que de me perdre. Joyeusement repartie pour une nouvelle série d’allers-retours, j’ai finalement décidé de demander mon chemin, ravalant mon amour-propre déjà bien mal en point.

C’est ainsi que je suis parvenue à rentrer à ALAD, dégoulinante de sueur et d’essence, parsemée de tâches de peinture et rougie par le soleil. Le sourire envolé et en proie à une rage d’avantage due à une fatigue monumentale, je me suis attelée au nettoyage de mon vélo et ai trouvé je ne sais comment le moyen de m’entailler le pied, histoire de clore l’aventure sur une note d’héroïsme.

Le fameux pantalon porte désormais l’indélébile marque jaune de cette épopée initiatique, mais rassurez-vous, je mène depuis une vie plus paisible.





lundi 15 octobre 2007


Ma rentrée des classes…


Le 2 octobre dernier, j’ai retrouvé les bancs de l’école. L’école maternelle ! Souvenir amer de mon jeune âge…

Promis, je n’ai pas pleuré cette fois-ci, ni passé trois heures dans mon coin à faire du sable doux. A vrai dire, je n’ai pas eu bien le choix, car aujourd’hui, les rôles ont changé.
Je me suis donc retrouvée devant une soixantaine d‘enfants, inquiets et inquisiteurs face à cette étrange peau de couleur blanche. Certains n’ont cessé de hurler de terreur qu’au bout du troisième jour. Inoubliables instants de solitude…



Ce cap étant passé, je profite désormais pleinement de ma nouvelle tâche de «Tantie». Je reçois chaque matin une bonne dose de bonne humeur et ne me lasserai jamais du « Booonjouuur Tantiiiiiiiie Fleulèèèène !!!!! » quotidien.


Comme il faut une contrepartie à tout, je dois avouer ma difficulté d’adaptation au système éducatif malien, du moins à celui de cette école, gérée par une directrice « déchargée de cours » et une institutrice sans aucune formation. Mes quelques acquis pédagogiques ne sont pas de refus pour «Tantie Bawa», ma nouvelle collègue de travail, qui jusqu'à présent s’occupait seule des soixante enfants…

A nous deux, nous formons une bonne équipe. Elle me familiarise avec la culture malienne, le mode de vie des enfants et m’enseigne les rudiments du Bambara (le dialecte local) tandis que je lui apprends de nouvelles chansons françaises.


Pour l’instant, je me consacre beaucoup à l’observation et prends peu d’initiatives. J’ai trop peur de tomber sans le vouloir dans une attitude colonialiste. Quand j’aurai une meilleure approche des différents fonctionnements, je pourrai tenter de proposer des méthodes en association avec le travail de Bawa.



Il y a cependant un aspect de l’éducation des enfants qui m’a véritablement consternée : la sensibilisation au danger. Celle-ci est totalement inexistante, à l’école comme dans la vie quotidienne. Brûlures, coupures, chutes, sont le lot quotidien de ces enfants à qui tout est permis, contrairement à ce que l’on pourrait croire. Clous et pièces de monnaie se promènent de bouche en bouche, le tout dans un manque d’hygiène malheureusement inévitable. Ajoutées à cela les multiples maladies, le résultat en est qu’un enfant malien sur deux n’atteint pas l’âge de quatre ans. Un constat plutôt désastreux…


Quelle influence puis-je prétendre avoir, moi, dans ma petite école de brousse ? Les enfants ne comprennent rien à ce que je leur raconte et mon autorité laisse donc à désirer. Il est grand temps que je progresse en Bambara !


En attendant, j’apprends beaucoup de tous ces petits bouts de chou et de la population en général, qui, par ses sourires, nous donne chaque jour une grande leçon de vie, à nous, occidentaux, éternels insatisfaits de notre situation, pourtant si enviable.




jeudi 11 octobre 2007


L’aventure commence…


Mieux vaut tard que jamais, la faute des chaussures reprend du service et tentera de me suivre au long de mes aventures maliennes.

Voilà déjà trois semaines que j’ai débarqué ici. Que le temps passe vite ! Soleil radieux, couleurs chatoyantes, rires d’enfants… Tel est mon fardeau quotidien. Rassurez-vous, je fais tout de même semblant de ne pas être en vacances.

L’ONG avec laquelle je travaille s’appelle ALAD et elle se situe à Kalabambougou, sur les rives du fleuve Niger, à proximité de Bamako.



Ses actions sont principalement centrées sur la scolarisation, puisqu’elle gère un système de parrainage de plus de quatre cent enfants répartis dans une dizaine de villages alentour.

Notre travail : trouver sans cesse de nouveaux parrains en France, nous rendre dans les écoles ici au Mali pour sélectionner les enfants, en fonction de leur situation familiale et de leurs résultats scolaires. Avec les cotisations récoltées par le parrainage, nous achetons des fournitures scolaires que nous distribuons dans les écoles.



Au Mali, le taux de scolarisation est estimé à 64% pour les garçons et 34% pour les filles. Les classes sont surchargées (160 élèves en classe de CE1 à Kalabambougou !) car le personnel enseignant est insuffisant (ce qui est compréhensible compte tenu du niveau de leur rémunération). Par conséquent, le taux d’alphabétisation atteint seulement 19%.



L’éducation se pose pourtant comme une source essentielle de développement durable, pour ce pays classé au 174ème rang mondial sur 177 [selon l’indicateur de développement humain (IDH) du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) qui prend en compte trois éléments, le pouvoir réel d’achat, l’espérance de vie (41 ans !) et le niveau d’éducation par habitant].


Scolariser un maximum d’ enfants, les aider tout au long de leur parcours par un suivi régulier et construire ainsi les adultes de demain, tel est donc l’objectif principal d’ALAD.

L’association touche aussi à d’autres domaines de développement comme la santé et la prévention, le travail des femmes… Elle a mis par exemple en place un système de commerce équitable issu de la production de groupements de femmes.


Pour des informations plus précises, rendez-vous sur le site alad.mali.free.fr